Ryoji Ikeda - Datamatics

Publié le par magicalme


Ryoji Ikeda - Datamatics [ver 2.0]
Centre Pompidou
22 novembre 2008

Artiste japonais de musique éléctronique, Ryoji Ikeda revenait pour la troisième année au centre Pompidou (après C4I en 2004 et datamatics [ver 2.0], déjà, l'année dernière), cette fois-ci dans le cadre du Festival d'Automne à Paris. Son projet actuel, intitulé lui aussi datamatics, englobe un certain nombre de réalisations plastiques : plusieurs installations, des spectacles audiovisuels (plus que des concerts, puisque Ikeda n'apparaît pas sur scène), un programme radio diffusé sur France Culture en 2006-2007, et deux parutions CD à ce jour.

La spécificité de ce cycle est qu'il est basé sur les données, au sens strict du terme: des séquences de chiffres (que ce soient des coordonnées d'étoiles ou le nombre d'acides aminés dans une molucule) ou des "figures géométriques" (telles que la séquence ADN que l'on peut voir sur l'image ci-dessus) sont interprétées en temps réel par un ordinateur, et sont projetées sur un écran. Autant le préciser d'emblée, les compositions de Ryoji Ikeda brillent par leur ascétisme: fréquences suraiguës, basses extrêmement profondes, et plages de bruit brut. Et rien d'autre. De même, en ce qui concerne les vidéos: noir blanc, rouge et bleu. Aucune image réelle, simplement des créations par ordinateur (points, lignes...), figuratives toutefois.

Datamatics [ver2.0] est composé de trois parties d'environ 20 minutes chacune (ce qui ne fait pas très long au final!), qui ont un thème propre: la première est centrée sur le génome humain, la seconde sur les coordonnées spatiales d'étoiles, la troisième étant un peu plus particulière, puisqu'elle est concerne d'abord une molécule, puis l'oeuvre elle-même!



On pourrait donc s'attendre au mieux à un somme d'une heure, au pire à une surdité définitive (voire la cécité). Mais Ryoji Ikeda maîtrise parfaitement les éléments à sa disposition, et il n'en est rien.
On est transporté de bout en bout par les images, tellement suggestives malgré la petitesse des moyens. La synchronisation du visuel et du sonore est une des clefs de cette réussite, puisqu'à chaque élément correspond un mouvement sur l'image. Mais c'est tout simplement le déferlement incessant et sans cesse renouvelé qui nous tient en haleine! D'ailleurs, sortis de la présentation, nous nous sommes demandé "mais comment fait-il?", tant l'impression créée par ces simples éléments combinés est forte!

L'oeuvre alterne ainsi passages de relatif calme et explosions sonores, qui laissent le spectateur toujours sur le qui-vive: les changements sont toujours brusques, si bien que même pour ma deuxième vision de cette oeuvre, je n'ai pu m'empêcher de sursauter à certains moments! De plus, loin d'être purement bruitiste, la musique de Ryoji Ikeda s'avère très construite, presque dansante par moments (si tant est qu'il soit possible de danser sur des infra basses et des ultrasons!).



La force de datamatics [ver 2.0] réside aussi en grande partie dans son thème: les données sont un vaste champ suggestif, qui s'étend de l'infiniment petit (la molécule) à l'extrêmement grand (les étoiles) et met ainsi le spectateur face à des objets presque inconcevables. Mais plus habile et plus puissant encore, l'oeuvre se met en abyme dans sa troisième partie: elle prend ainsi pour donnée brute les images des deux première parties! Et de cette manière appuie subtilement son propos.

Mais il serait vain de tenter de décrire plus avant cette expérience: de même que la captation en est très difficile, tâcher de rendre les émotions suscitées par cette oeuvre relève de l'idéalisme.

Cependant, pour faire plus ample connaissance avec le monsieur bridé, voici quelques exemples, qui malheureusement ne sont pas aussi intéressants sortis du contexte du direct, ni de très bonne qualité...

Un extrait de son dernier album très bruitiste test pattern
Un extrait de son album précédent dataplex
Et un autre

Deux extraits du concert, en captation bas de gamme:
http://fr.youtube.com/watch?v=4ehcP5FPxHo
http://www.dailymotion.com/relevance/search/ryoji%2Bikeda/video/x3pkpa_ryoji-ikeda-jp-datamatics-10_music

Et enfin, des images de deux oeuvres précédentes, Formula [ver 2.2] et C4I (Cette dernière étant pour moi SA plus grande réussite à ce jour. Je désespère de la revoir un jour, d'ailleurs):

http://archive.ycam.jp/#/works/65

Publié dans Musique pas classique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
S
Ce qui me stupéfie chez cet artiste, c'est vraiment le fait qu'à 10 sons, il bâtisse un univers formidable et qu'il tienne la chose pendant une heure !<br /> Cela dit, c'est clair que sans l'image, cela m'intéresse mille fois moins...
Répondre